Roberto Fernandez Retamar nous a quitté

Roberto Fernandez Retamar nous a quitté

Roberto Fernandez Retamar, une grande figure de la culture cubaine nous a quitté à La Havane le 20 juillet 2019

Anne Delstanche

Roberto Fernandez Retamar

C’est à l’occasion du 60e anniversaire du triomphe de la Révolution cubaine que Roberto Retamar déclare dans un essai :

“Confions à nouveau en l’Espérance qui, selon Hésiode, fut la seule qui resta arrêtée sur les bords du vase, lorsque toutes les autres créatures s’envolèrent. En d’autres temps agités, aussi bien Romain Rolland qu’Antonio Grams ci ont év oqué le scepticisme de l’intelligence, auquel ils ont proposé d’opposer l’optimisme de la volonté. Il y a quelques années, j’ai proposé d’ajouter à ce dernier la confiance en l’imagination, cette force essentiellement poétique : l’his toire, sel on M arx, a plus d’imagination que nous”.

Roberto Fernandez Retamar a accompagné la révo- lution cubaine dès le début.  Il a été  au coeur même de l’oeuvre culturelle révolutionnaire, un lutteur permanent dont le travail a participé au développement du patrimoine culturel de l’Amérique latine.

Né à La Havane le 9 juin 1930 il était poète, essayiste et un véritable promoteur culturel. C’est en 1947 qu’il sera diplômé en sciences et lettres et en 1954 il obtient un doctorat en philosophie et lettres à l’Université de La Havane. Il passera par la Sorbonne à Paris en 1955 où il suivra un cours de linguistique. Il a aussi été Professeur à l’Université de La Havane depuis 1955. C’est en 1958, en pleine dictature de Batista, qu’il rentre à Cuba et rejoint le Mouvement de résistance civique. Il publie alors des articles dans la presse clandestine.

Il collabore à la revue “Origines” depuis 1951. Il a été Conseillé culturel de Cuba en France (1960) et Secrétaire de l’UNEAC entre 1961 et 1964. Il a été président de la très célèbre Maison des Amériques (Casa de las Américas) qui décerne chaque année des prix mondialement reconnus à des auteurs latino-américains. La notoriété de la Casa est internationale et chaque année des centaines d’écrivains de toute l’Amérique se présentent au concours.

Il a été président de l’Académie de la langue cubaine, membre du Conseil d’Etat et député de l’Assemblée nationale du pouvoir populaire entre 1998 et 2013. En 1977 il propose à Armando Hart qui vient d’être nommé Ministre de la culture, la création du “Centro de Estudios Martianos” qu’il dirigera jusqu’en 1986. Pendant 15 ans il a travaillé sous la direction de Haydée Santamaria à laquelle il a dédié deux livres et sur laquelle il a écrit plusieurs textes en prose et un poème. En 1961 il est élu Secrétaire coordinateur de l’UNEAC. En 2008 il est élu Directeur de l’Académie cubaine de la langue.

Ses poèmes ont été publiés en France en 2014 aux éditions “Temps des cerises”.

Un très grand penseur, une oeuvre intellectuelle de grande ampleur. Lors d’une interview il déclare : “Je pense que le défi actuel de nos intellectuels doit être à la hauteur des changements si importants que vit notre Amérique. Et je suis sûr que les jeunes répondront affirmativement à ce défi”

Heureux les normaux, ces êtres étranges. Mais qu’ils laissent la place à ceux qui font les mondes et les rêves. (Roberto Fernandez Retamar)

Heureux les normaux, ces êtres étranges.

Ceux qui n’ont pas eu une mère folle, un père ivrogne, un fils délinquant,

Une maison nulle part, une maladie inconnue, Ceux qui ont vécu les dix-sept visages du sourire et un peu plus.

Les pleins de chaussures, les archanges à chapeaux,

Les satisfaits, les gros, les beaux, Les chiens savants et leurs adeptes, Ceux qui je vous en prie, par ici,

Ceux qui gagnent, ceux qui sont aimés jusqu’à la garde,

Les joueurs de flûtes accompagnés de rats, Les vendeurs et leurs acheteurs,

Les chevaliers légèrement surhumains,

Les hommes vêtus de tonnerre et les femmes d’éclairs,

Les délicats, les sensés, les fins,

Les aimables, les doux, les comestibles et les buvestibles.

Heureux les oiseaux, le fumier, les pierres. Mais qu’ils laissent la place à ceux qui font les mondes et les rêves,

Les illusions, les symphonies, les mots qui nous détruisent

Et nous construisent, aux plus fous que leurs mères, plus ivrognes Que  leurs  pères e t           plus délinquants que leurs fils

Et plus dévorés par des amours calcinantes

Qu’ils leurs laissent leur place en enfer, et c’est tout.

Il a obtenu de nombreux prix nationaux et i nternationaux dont quel ques exemples ci-dessous :

1952 – Prix national de  poésie 1989 – Prix national de littérature 1994 – Médaille Alejo Carpentier 1996 – Prix de la critique littéraire

2007 – Prix National de la recherche culturelle

2008 – Prix ALBA des lettres 2009 – Ordre José Marti

2012 – Prix National de Sciences Sociales

1972 – Membre d’honneur de la Société des écrivains du Chili)

1980 – Prix latino-américain de poésie Ruben Dario (Nicaragua)

1994 – Prix international de poésie Perez Bonalde (Venezuela)

1994 – Diplôme officiel de l’Ordre des Arts et des Lettres (France)

2000 – Prix Feronia

2001 – Prix Nicolás Guillén (Italie) 2002 – Puterbaugh Fellowship (États- Unis)

2019 – Prix international José Martí décerné par l’UNESCO.


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