Cuba Sí 179 – traductions

Cuba Sí 179 – traductions

Interview du consul de l’ambassade cubaine

Après trois ans de séjour en Belgique, Yurielkys Sarduy Martínez, troisième secrétaire et responsable de la solidarité à l’ambassade de Cuba, retourne à Cuba pour y assumer d’autres responsabilités. Le temps pour un bilan.

Quelles furent vos tâches à l’ambassade ?

Laissez-moi d’abord vous expliquer que j’ai terminé mes études en relations étrangères en 2008. La Belgique à donc été ma première mission à l’étranger.

Je suis arrivée ici en 2010 avec la mission de me charger des thèmes consulaires. Traditionnellement l’ambassade de Cuba en Belgique confie la solidarité à la même personne. Comme c’était ma première mission à l’étranger, je suis devenue troisième secrétaire de l’ambassade. Finalement, dès le début je me suis également chargée du thème de la migration, dans le contexte du dialogue bilatéral entre la CELAC (Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes) et l’ Union Européenne. Entre temps Cuba assure la présidence de la CELAC. Voilà mes différentes tâches durant ces trois dernières années.

Quelles furent vos espérances en début de mandat, avez-vous du les adapter souvent et quel fut le résultat final ?

Ce n’est qu’arrivé en Belgique que l’on m’a informé que j’étais chargée de la solidarité. Je n’avais pas vraiment des attentes, mais je savais de l’information obtenue à Cuba que la solidarité ici en Belgique était une solidarité très positive. J’ai commencé par découvrir les différentes organisations. Pour moi la solidarité est quelque chose de beau, pas seulement au niveau professionnel mais aussi au niveau humain. C’était passionnant de voir ce qui motivait les gens pour s’engager pour Cuba.

C’était le plus bel élément de mon job et cela en restera toujours une partie importante, justement parce que c’est tellement intense et honnête. Et j’y ai consacré beaucoup de temps.

Qu’est-ce qui vous a le plus marqué et/ou a laissé le plus de souvenirs ?

La première conférence que j’ai donnée était très difficile. Je ne connaissais pas le public et je devais sérieusement m’adapter à la diversité des questions posées, mais après un certain temps cela allait mieux. J’aurais voulu apprendre le néerlandais, mais cela n’a jamais réussi à cause du travail intense de mes différentes fonctions.

Ce qui m’a ému profondément, c’est la cérémonie que nous avons organisé pour la remise des médailles à Irma et Marguerite. Toutes les organisations étaient présentes et c’était, pour nous, une façon de rendre un petit morceau à la solidarité et pour ce qu’elle a fait année après année.Nous nous rendons compte que nous ne pouvons pas le rendre entièrement, mais c’est une façon d’exprimer notre appréciation.

Ce qui m’a profondément marqué, c’est le décès de Stéphane et la perte d’autres amis, comme Elly, qui ont si longtemps collaboré avec Cuba.

Quel sont, selon vous, les défis au sein de la solidarité en Belgique ?

Avant tout je voudrais encore souligner que la solidarité en Belgique est active, forte et intense. Les quatre organisations travaillent avec le même objectif : Cuba. Chacune à ses propres principes et chacun sait ce qu’il veut. C’est ressenti ainsi à Cuba. En ce qui concerne les défis je crois qu’une meilleure cohésion entre les différentes organisations est un défi important. Une bonne partie du chemin a été parcouru, mais un développement poursuivi reste un défi permanent. Un deuxième défi est de susciter l’intérêt d’un public jeune afin de continuer à se développer.

Avez-vous constaté une évolution au sein de la solidarité durant votre mandat ?

Absolument ! Non pas parce que j’en avais la responsabilité, mais des progrès ont été réalisés. La solidarité est encore plus active qu’auparavant, des liens se sont tissés entre Cuba et la Belgique qui n’existaient pas et cela a mené à plus de contacts et d’échanges entre Cuba et la Belgique. Les régionales qui n’ont pas avancé ont maintenu leur intensité et cela aussi est important.

Est-ce que les activités des Amis de Cuba correspondent aux besoins de Cuba ?

Toutes les sortes de solidarité sont importantes. Tant le soutien politique que le soutien économique sont fondamentaux. Les Amis de Cuba ont réussi à combiner ces deux formes de solidarité. D’autre part votre organisation réussit à développer des contacts avec Cuba de différentes façons, par les brigades, des projets comme « Instruments pour Cuba » ou le projet à Holguín. Ces contacts mènent à mieux se connaître et se comprendre. Les connaissances qui viennent de ces contacts sont alors diffusées par les amis. La diffusion peut se faire de différentes façons. Par des projets comme « Instruments pour Cuba » ou la « Semaine de la culture cubaine », Cuba est présenté d’une toute autre façon que d’habitude. A leur manière les Amis de Cuba combinent la solidarité que répond aux besoins de peuple à peuple et ainsi ils montrent Cuba au monde extérieur. Cuba y attache beaucoup d’importance. Et Cuba compte sur ses amis !

Comment situez vous la Belgique dans le domaine de la solidarité en Europe ?

Je dois avouer honnêtement que je ne suis pas bien au courant de la solidarité dans les autres pays d’Europe. Via l’ICAP je sais que la Belgique, malgré son nombre réduit d’habitants, témoigne d’une solidarité positive et durable envers Cuba. La Belgique est toujours présente et a beaucoup de militants. Certainement si l’on compare avec de grands pays comme l’Italie, l’Espagne ou l’Allemagne, le nombre de militants actifs est plus élevé en Belgique que dans les autres pays d’Europe.

Comment est ressentie la solidarité internationale avec Cuba à Cuba même ?

En règle générale la solidarité est un principe courant au sein de la culture des Caraïbes. Offrir la solidarité comme la recevoir sont toujours bienvenus. La solidarité est une caractéristique altruiste propre à nos traditions. Elle existait avant la révolution et tant donner que recevoir est chez nous une donnée culturelle. Bien sur, tant qu’il n’y a pas d’agenda caché à ce qui est offert. Cela doit se faire ouvertement et honnêtement et le donneur et le receveur doivent se trouver au même niveau.

Je me rappelle ainsi la première activité de la régionale d’Anvers où j’ai rencontré des gens qui me racontaient du soutien à partir de la Belgique, déjà avant 1959 !!

Quel aspect de la solidarité est pour vous le plus relevant ?

Toute la solidarité est importante tant qu’elle est honnête et ouverte, avec le respect de l’identité cubaine. La Belgique en est un exemple d’école. Je crois aussi qu’il est important que les membres continuent de visiter Cuba afin de vivre les changements et de rester au courant de la réalité quotidienne de l’île.

S’il fallait choisir entre les différentes fonctions exercées à l’ambassade, vous choisiriez la solidarité ?

Il y a beaucoup de travail dans une ambassade, mais la solidarité n’était pas, pour moi, un « vrai » travail, malgré le fait qu’elle accaparait le temps libre et les week-ends. La beauté de la solidarité compensait ceci. J’espère que j’aurai encore la chance d’assumer cette tâche et, en tout cas, elle me manquera.

Et la Belgique, elle vous manquera ?

Certainement, c’était un lieu agréable pour travailler, la société est bien faite et nous avons beaucoup réalisé. J’espère avoir un jour la chance de revenir.

Par contre le climat ne me manquera pas.

Voulez-vous ajouter quelque chose à cet interview ?

Je voudrais certainement ajouter que je garderai toute ma vie le fait d’avoir vu tant d’amour et de dévouement chez votre fondateur Freddy Tack. L’honnêteté, l’ouverture, l’éthique et le dévouement permanent qu’il démontre envers Cuba est inimaginable. Les Amis de Cuba doivent être fiers d’avoir quelqu’un comme lui parmi leurs membres.

Merci pour cet interview.

Par: Alexandra Dirckx

MENIA MARTÍNEZ : ballerine, révolutionnaire, présidente de l’association « Cubanos en Bélgica »

Cuba Sí : Menia, comment es-tu arrivée à la danse ? Tu es d’une famille d’artistes ?

Menia : Pas du tout. Je me le demande tout le temps parce que je suis en train d’écrire mes mémoires. Quand j’étais petite je chantais. Je voulais être chanteuse et danser. Je voulais faire de la comédie musicale. Ma famille était très musicale, très artiste, mais personne n’était professionnel. Et toute petite j’avais une tante qui me prenait tout le temps en photo lorsque je chantais ou je bougeais, alors j’ai plein de photos de moi comme si j’étais une actrice à 2 ans, 3 ans, 4 ans. Mais on m’a mis au conservatoire pour faire des études de musique, j’avais 11 ans, la voix n’était pas encore développée et on m’a dit : « Vous ne pouvez pas, il faut attendre 14 ans pour que se révèle la voix ». En attendant je faisais de la danse espagnole, des choses comme ça et c’est seulement à 14 ans que j’ai eu une bourse à l’école Alicia Alonso. Alors Fernando Alonso a dit : « Pas question, oublie le théâtre, oublie le chant, tu seras une danseuse classique. Et alors j’ai eu la bourse et j’ai voyagé avec eux à 14 ans. J’avais toujours une lettre de ma famille parce que pour avoir la permission de voyager il me fallait une lettre, j’étais mineure. Et ça m’a beaucoup aidé parce que j’étais sur scène très tôt, à 14 ans, 15 ans, 16 ans.

Après je suis partie avec un groupe de la jeunesse à Varsovie et c’est là que j’ai rencontré le théâtre Bolchoï. Tout le monde m’a dit « pourquoi tu ne fais pas une présentation pour voir si on te donne une bourse en Russie pour faire de la danse classique dans ce pays ?». Et finalement je l’ai fait et on m’a donné une bourse. Alors on m’a envoyé à l’école Vaganova de Leningrad, qui est la meilleure école qui a formé Baryshnikov, Nureyev, Nijinsky. C’est LA grande école. Au début j’étais étonnée et j’ai dit « Pourquoi on m’envoie ici ? Ce n’est pas la capitale ». Je ne savais pas, je ne connaissais pas. Après j’ai vu que j’étais vraiment une fille qui avait le privilège d’être dans cette école et que j’avais beaucoup de chance d’avoir été envoyé là. Quand j’ai été diplômée je suis rentrée à Cuba pour entrer au Ballet national de Cuba.

La première fois que j’ai vu Béjart c’était en 1968 à Cuba et Béjart a eu une espèce de « contact » avec moi, je ne sais pas pourquoi. Il était intéressé mais comme j’appartenais au Ballet national de Cuba il pensait vraiment qu’il était impossible de m’inviter, qu’ Alicia Alonso n’allait pas me laisser partir et que j ‘aurais des problèmes pour sortir de Cuba. Il ne m’a rien dit, mais il l’a dit au Ministère de la Culture et quand j’ai quitté le Ballet National pour aller en province, immédiatement le Ministère de la Culture a dit : « Vous vouliez Menia Martínez, elle est libre maintenant, vous ne devez plus faire la demande au Ballet National de Cuba, mais directement chez nous au Ministère ». Et effectivement Monsieur Guzman, qui était directeur de la Monnaie à envoyé le contrat et c’est ainsi que je suis arrivée ici, en octobre 1969.

C.S. : Et directement pour vous intégrer au Ballet de Béjart.

Menia : OUI, au ballet comme danseuse. Je n’avais jamais pensé intégrer cette compagnie que j’avais admirée sur la scène du Grand Théâtre de La Havane. Mais quand le Ministère m’a demandé si ça m’intéressait, car si je disais oui on m’envoyait chez Béjart, alors j’ai dis oui, immédiatement, car j’étais sûre d’apprendre beaucoup avec ce monsieur. Quand je suis arrivée j’ai eu une très bonne collaboration avec Maurice. Il a été formidable avec moi et m’a dit « Tout ce que tu veux ici, tu peux me le demander si le ballet t’intéresse ». Il parlait beaucoup de politique avec moi. Il connaissait mes idées, il savait que j’avais été en Chine, il s’intéressait beaucoup à La China, à l’Union Soviétique et à tout ce qui se passait à Cuba.

Lors de ces années avec Béjart je me suis mariée avec Jorge Lefebvre, un danseur qui était arrivé ici plusieurs années avant moi et que j’avais rencontrée à Cuba. Il était venu chez moi un jour où j’avais invité un groupe de danseurs, mais je n’avais jamais pensé qu’il allait être mon mari, mais finalement on s ‘est marié un an plus tard. Quand je suis arrivée ici, en Belgique, l’ambassade de Cuba m’ a invité à différentes activités. On avait beaucoup de travail, c’est une compagnie qui voyageait tout le temps. On restait ici une semaine et on partait trois mois. C’est là que j’ai connu les Amis de Cuba, la première fois qu’ils ont fait cette grande activité, et jusqu’à maintenant lorsqu’ils ont fêté leur 40 ans, j’étais présente parce que pour moi c’était important ici en Belgique.

Et voilà l’histoire de mon arrivée en Belgique. Quand j’ai quitté le Ballet du XXième Siècle pour rejoindre le Ballet de Wallonie, c’était un moment où on m’invitait beaucoup pour danser du classique et je me suis dit « Le ballet classique, il y a un âge pour çà. Le ballet contemporain on peut continuer à le danser. Pour le ballet classique il faut être en forme », et j’étais très en forme à ce moment là. On m’avait invité à danser le Lac des Cygnes, on m’avait invité en France à danser Gisèle et j’en ai parlé avec Maurice. Il m’a dit « Ici, c’est ta maison, quand tu le veux c’est toujours chez toi ». Je lui ai dit « Vous comprenez que je dois danser les années qui me restent comme classique, et après je vais continuer à danser autre chose, comme le font toutes les étoiles ». J’ai continué à collaborer avec la compagnie, qui m’a invité à danser à la Monnaie pour le 15e anniversaire, alors que je n’en faisait plus partie.

Comment me suis-je retrouvée au Ballet de Wallonie ? Parce que mon mari voulait faire des chorégraphies. Il était très attaché à Madame Voos, l’ancienne directrice du Ballet de Wallonie. Il avait déjà monté quelques ballets et voulait continuer comme chorégraphe, alors Mme Voos m’a invité en tant que professeur de la compagnie et en même temps Jorge pouvait faire des chorégraphies pour le ballet. En 1980 Mme Voos a quitté la compagnie et on a pensé à Jorge Lefebvre comme directeur, alors il est devenu directeur artistique et j’étais sa principale collaboratrice. Mais j’ai aussi continué à collaborer avec Béjart. Il voulait que ce soit moi qui inaugure la compagnie BBL (Béjart Ballet Lausanne) et alors je me partageais entre Lausanne et le Ballet Royal de Wallonie. J’y suis resté jusqu’en 1990, lors du décès de mon mari. Après je suis devenue indépendante, j’ai donné des cours en France, en Italie… et j’ai continué à aller à Cuba, comme toujours pour collaborer à la danse et à tout ce qui existait là-bas. On avait demandé à Jorge Levebvre d’être directeur d’une compagnie à Santiago de Cuba . A la mort de Jorge il y avait une autre directrice avec qui j’ai eu une très bonne collaboration, je les aide beaucoup et j’ai déjà fait plusieurs choses avec eux et on y a présenté plusieurs ballets de Jorge. Et je continue avec le ballet de Camaguey, presque tous les ballets que Jorge avait réalisé au Ballets de Wallonie ont été arrangés pour cette compagnie. Et voila, c’est la raison pour laquelle je suis ici en Belgique. Et je continuerai, mais peut-être que bientôt je vais m’en aller, j’ai des projets à Cuba.

En septembre 1961 Fidel participe à L’ Assemblée Générale des Nations-Unies. Finalement la délégation cubaine s’installe à l’hôtel Teresa, à Harlem. Une réunion a lieu dans la chambre 229 avec Khrouchtchev, Fidel, Raúl Roa et Nuñez Jimenez. Selon les mémoires de ce dernier « En marcha con Fidel », la traductrice lors de cette rencontre était une jeune danseuse, Menia Martínez. Quel souvenir en gardez vous et comment vous trouviez-vous là, en ce moment historique ?

Menia : Je dois d’abord vous raconter comment j’ai été mise en relations avec Fidel. Je venais de rentrer d’Union Soviétique, en 1960. En 1961 j’étais avec mes soeurs, elles appartenaient à une organisation de la jeunesse socialiste à Cuba et je les ai accompagné à une soirée. A cette soirée assistaient Che Guevara, Fidel Castro, Raúl Castro, ils étaient tous là, ainsi que Anastase Mikoyan, le Ministre Soviétique de la Culture. Mes soeurs trouvaient que, parlant russe, je devais lui remettre un livre sur la jeunesse cubaine. J’ai dit oui et j’ai dit « Voilà monsieur, c’est un livre de la jeunesse à Cuba. Alors Mikoyan s’est levé, je n’ai pas regardé les autres, je n’ai pas vu qu’en face de moi il y avait Fidel Castro, Che Guevara, Raúl Castro, tout le gouvernement était là. Mikoyan m’a dit, quel est votre prénom, votre nom ? J’ai répondu « Je m’appelle Menia Martínez ». Il s’est levé, m’a embrassé et a crié pour tout le monde « Elle est Nacha, elle est des nôtres, c’est une fille que j’aime beaucoup parce qu’elle a beaucoup chanté en Russie et toute ma famille adore ses chansons et ses disques. Elle a fait des études en Russie. » Alors Fidel m’a demandé qui j’étais, qui était mon père. J’ai dit que mon père est quelqu’un de conventionnel, vraiment, il n’avait pas de poste au gouvernement ni ne faisait partie du parti communiste cubain, il n’était pas socialiste, mais il avait des idées de gauche, c’est tout. Alors Fidel m’a demandé mon numéro de téléphone et je lui ai donné.

Quand il a fallu aller aux Nations-Unies, quelqu’un est venu chez moi de la part du Comandante

demandant que je voyage avec lui, mais je ne devais le dire à personne, même pas à ma famille. J’ai dit à ma famille que j’allais voyager car on m’envoyait je ne sais plus si j’ai dit le Costa Rica ou le Venezuela, pour donner des cours.

Mon contact avec Khrouchtchev était très comique car Fidel m’a présenté comme une cubaine, une jeune fille qui parle le russe, en tant qu’ interprète, et Khrouchtchev disait tout le temps española, española, parce que pour les russes parler espagnol c’est être espagnol. Fidel disait tout le temps , non non non, elle est cubaine et Khrouchtchev continuait, oui, oui, española, española… ce qui a fait rire toute la délégation.

Pour la traduction j’étais un peu préoccupée au départ, mais quand j’ai commencé à faire ce travail comme traductrice j’étais très calme, parce que le fait d’être artiste quand on arrive sur scène on est sûr de soi et on oublie toute la nervosité qu’on a avant, et ça c’est pareil. C’était comme si j’arrivais sur scène et j’avais rempli ma mission comme artiste, mais à ce moment là comme traductrice. Et c’est çà que je pensais parce que finalement, si j’avais réfléchi j’aurais dit c’est trop de responsabilité. C’était la première rencontre entre un ministre d’un pays et le ministre de l’autre, surtout c’était la première grande relation qu’a eu l’ Union Soviétique avec Cuba.

C.S. : Tu avais quel âge à cette époque ?

Menia : Je n’avais même pas 21 ans.

C.S. : Vous êtes maintenant présidente de « Cubanos en Bélgica ». Quels sont les objectifs principaux de votre association et comment réagissent les cubains qui vivent en Belgique ?

Menia : Quand je suis arrivée il y avait très peu de Cubains en Belgique et ceux qui étaient là ne venaient pas tous à l’ambassade de Cuba. Il n’y avait pas cette relation que nous avons maintenant. Comme vous le savez l’immigration cubaine a beaucoup changé. L’immigration il y a 40 ans n’était pas la même que celle d’aujourd’hui. A cette époque les gens partaient parce qu’ils n’étaient pas d’accord avec le système qu’il y avait à Cuba. Maintenant l’immigration qui arrive, ce sont des gens attachés à Cuba, qui retournent à Cuba et qui viennent pour des problèmes familiaux, des problèmes économiques, ou simplement pour connaître un autre pays, et ils gardent des relations avec Cuba. Alors, l’immigration d’aujourd’hui c’est une immigration, comme je pourrais dire, la majorité, favorable à Cuba, favorable à leur pays. Ils sont vraiment intégrés et avec cette association de Cubains en Belgique j’ai trouvé précisément ce dont je parle, cet attachement au pays.

On m’a proposé de partir travailler dans d’autres pays, même l’Espagne où on parle ma langue, j’ai dit non. J’aime bien la Belgique et j’aime bien les Belges. J’ai un très bon contact, j’ai beaucoup d’amis et je crois que je suis utile ici. Et je trouve que de tous les pays d’Europe c’est un pays calme, les gens sont très gentils, très bien élevés et je me sens bien, je ne pourrais pas vivre à Paris, mais je peux vivre à Bruxelles. Alors je me sens bien ici et je vois que toute la communauté cubaine qui est à Bruxelles a le même sentiment que moi. On ne peut jamais comparer à Cuba, ni le climat, ni les gens, mais ils me disent la même chose, qu’ils se sentent tranquille ici, qu’ils ont de bonnes relations, qu’ils ont de bons amis et qu’il n’y a pas tellement ce type de gens hostiles à notre pays.

C.S. : Quels sont les buts de l’association, les activités ?

Menia : Pourquoi on a l’association, parce qu’on trouve que tous ces gens qui habitent ici, il faut les regrouper et les intégrer pour qu’ils ne se sentent pas seuls. Beaucoup de gens m’écrivent ou m’envoient des mails pour me dire « Je viens d’arriver et l’ambassade m’a dit de prendre contact avec vous et ils sont déjà venu chez moi. C’était tellement agréable parce qu’ils arrivent et ils ne connaissent personne, alors l’association est un endroit pas seulement pour parler de politique, mais pour faire des fêtes, pour écouter de la musique, pour danser, pour avoir une relation d’amitié.

La politique c’est important parce que à travers l’association on peut, quand quelque chose qui existe contre Cuba et que l’on est pas d’accord, on peut envoyer une lettre ou simplement une signature pour dire qu’on n’est pas d’accord avec ça.

C’est intéressant d’avoir une association, même si elle est petite, parce que tout le monde ne collabore pas, tout le monde a son travail, ses obligations. On ne peut pas les obliger, mais quand on dit qu’à tel endroit on a une exposition de peinture, le lancement d’un livre, ou quelqu’un qui arrive de Cuba, ou un spectacle, les gens arrivent, ils viennent et ils collaborent avec nous dans différentes activités, pas seulement une collaboration économique, on collabore aussi à la vente de mojitos, on vient faire des mojitos, préparer, inviter, servir, tout cela fait partie de la collaboration.

Par: Anne Delstanche

Turismo

En traversant Cuba – chapitre 11 : Santiago de Cuba – première partie

Par: Youri Blieck

Le Berceau de la Révolution, l’ Héroïque, les surnoms de Santiago de Cuba l’indiquent clairement, le rôle de la ville dans l’histoire cubaine n’est pas des moindres. Tant la lutte pour l’indépendance

que celle de la Révolution Cubaine ont commencé dans cette ville orientale, loin du pouvoir central de La Havane. Les endroits historiques et les monuments à visiter et à voir sont par conséquent nombreux.

La deuxième ville de Cuba, en grandeur, compte environ 500.000 habitants (plus de 1 million pour la province) et est une ville vibrante, très musicale qui est souvent décrite comme la ville la plus « caraïbe » de Cuba. Une toute autre atmosphère y règne que, disons, à La Havane. A la fin du 18e siècle (1791) une révolte des esclaves a lieu à Haïti, île voisine, et une partie des colons Français ont fui en direction de Cuba. Plus tard, une partie des esclaves libérés s’installait également vers l’île voisine et s’établit surtout dans la partie orientale de Cuba, dans la ville et la région de Santiago. Ceci explique le plus grand pourcentage de population noire que dans le reste du pays. Ces « immigrés » (tant les Français que la population noire) ont amené leur culture, leurs danses, leur musique, leur passion pour la fête et le carnaval. Santiago est par conséquent renommé pour ses traditions musicales, ses fêtes exubérantes et un carnaval qui a longtemps été cité en même temps que celui de Rio.

La ville a été fondée par Diego Velazquez en 1514 et fait partie des sept villa’s fondées par les espagnols, les sept villes originales de Cuba. Le premier bourgmestre de la ville a été Hernan Cortes, le conquérant par-après du royaume des Aztèques en du Mexique actuel. La fonction de capitale de Cuba, assumée brièvement par Baracoa (il y avait peu de villes ou de villages à cette époque), a été reprise par Santiago en 1515, rôle que la ville a gardé jusqu’en 1607. Il est vrai que les gouverneurs-généraux espagnols (représentant la couronne Espagnole) avaient déjà transféré leur siège à La Havane en 1556, mais Santiago de Cuba est officiellement restée la capitale jusqu’en 1607. Ce n’est qu’à ce moment que La Havane devient la capitale officielle du pays. L’ évêque de Santiago est encore resté l’instance religieuse la plus haute du pays jusqu’en 1788, quand un évêque fut nommé à La Havane également. Peu après (1804) Santiago remonte de nouveau d’une marche en devenant archevêché.

Dans d’autres domaines la ville et la région ont moins de succès. C’est la seule province de Cuba a souffrir de temps en temps de (faibles) tremblements de terre. En 1675 le séisme fut plus fort que d’habitude et le traitement de la population locale par les Espagnols locaux suscita des déplacements de population vers l’ouest de Cuba. Ajoutons aussi le fait que la côte sud de Santiago avait la faveur des attaques de pirates. Au 16e siècle la ville est pillée par Jacques de Sores, le pirate français, et au 17e siècle par Henry Morgan, deux figures réputées dans l’histoire des Caraïbes. Afin de protéger la ville de ces violence des pirates on a construit une ligne de défense de forts sur une bonne partie des côtes sud. Des vestiges subsistent à quelques endroits et un exemplaire a été restaurée et est devenu patrimoine culturel mondial sur la liste de l’UNESCO : le fort du Morro de Santiago.(Officiellement la Fortaleza de San Pedro de las Rocas, mais tout le monde l’appelle El Morro, en analogie avec le fort à l’entrée de la Baie de La Havane. Il ne faut pas chercher loin les ressemblances puisque les deux édifices militaires ont été conçus par l’ingénieur militaire Juan Bautista Antonelli).

Depuis 1607 jusqu’en 1975 Santiago était la capitale du département (et plus tard la province) d’ Oriente. Lors des transformations des structures en 1975 la grande province d’ Oriente a été divisée en cinq provinces de taille plus réduite (Las Tunas, Holguín, Granma, Santiago de Cuba et Guantanamo), et la ville de Santiago est devenue la capitale de la province du même nom, bien que de taille réduite.

Une visite de Santiago devient un voyage au travers des siècles où l’on rencontre chaque chapitre de l’histoire cubaine. Celui qui visite à pied aura parcouru un bon nombre de kilomètres à la fin de la journée, mais un taxi « old timer » peut soulager quelque peu l’effort.

La visite de la ville peut s’entamer par un petit morceau du patrimoine mondial de l’UNESCO déjà cité, le fort du Morro. En arrivant en avion à Santiago on atterri à quelques centaines de mètres du fort et on peut le visiter avant de se rendre en ville. En fait la visite se fait en deux parts, les environs, la situation du fort, sont en soi remarquables et s’imposent au visiteur : le fort domine la Mer des Caraïbes sur une hauteur qui offre une vue sur toute la baie de Santiago. D’un côté le bleu turquoise de la Mer des Caraïbes qui se jette avec des pointes d’écume blanche sur les rochers de la côte. De l’autre côté se profilent sur l’horizon les sommets de la Sierra Maestra. Entre les deux, la baie de Santiago avec au milieu Cayo Granma, une petite île essentiellement habitée par des pêcheurs. Une vue unique dont on ne se lasse pas. Et pourtant il y a plus, car une visite au Morro c’est aussi de l’architecture et de l’histoire. L’édifice militaire est en effet un des forts les mieux conservés dans les Caraïbes, datant de 1692, et le dédale de pièces, de salles, de couloirs, d’escaliers et de la place intérieure mérite une exploration approfondie. Cerise sur le gâteau, dans le fort se trouve maintenant le musée de la piraterie qui offre, par des textes, des photos, des plans et des dessins l’histoire des pirates dans la région. Le Morro offre à chacun ce qu’il veut y trouver.

Nous roulons vers la ville et nous poursuivons la visite sur la Place de la Révolution, d’édification plus récente, puisque la place a été remodelée en 1991. Durant cette année se sont déroulés les Jeux Panaméricains à Cuba et tant à La Havane qu’à Santiago on a fébrilement construit. Le plus frappant est le monument gigantesque dédié à Antonio Maceo, surnommé le Titan de Bronze. Cet héros national est né à Santiago (1845) et consacra sa vie à la lutte pour l’indépendance de son pays. Il combattait les espagnols à la machette et le monument de Santiago lui rend honneur dans ce style : une énorme statue en bronze, entourée de 23 machettes tout aussi imposantes. Le chiffre 23 fait référence à la protestation de Baraguá, le 23 mai 1878, quand Maceo lors de la déclaration d’un armistice entre les Espagnols et les Cubains, s’écrie qu’il ne déposera jamais les armes aussi longtemps que son pays n’est pas indépendant. Cette protestation avait lieu dans la petite localité de Baraguá. Le monument s’impose sur la place de façon impressionnante. A l’arrière du monument brûle une flamme éternelle, et au-dessus s’affichent deux citations, une de Maceo et une de José Martí. Un musée consacré à la vie de Maceo complète l’ensemble.

De l’autre côté de la place trône un autre grand bâtiment, datant lui aussi de 1991, le théâtre Heredia. En quittant la place par le théâtre on longe un petit monument dédié à Che Guevara et ses compagnons tombés en Bolivie, avant de voir, à droite, l’édifice en hauteur de l’hôtel Melia Santiago, lui aussi datant de 1991. A gauche on aboutit à Vista Alegre, l’ancien quartier résidentiel de Santiago. On y trouve quelques perles de l’architecture (nécessitant parfois une restauration), dont l’ancienne demeure d’ Emilio Bacardi y Moreau, l’ancêtre de la famille Bacardi et premier bourgmestre de Santiago après l’indépendance de Cuba (aujourd’hui transformé en palais des pionniers).

Oublions quelque peu le vieux centre de Santiago pour découvrir quelques lieux historiques un peu en dehors du centre. Premier sur la liste, bien sûr, la fameuse caserne Moncada. Quand, durant les années ’40 et le début des années’50, la situation était devenue catastrophique pour la plupart des Cubains (copinage du dictateur Batista avec les Américains, Cuba en tant que paradis de jeux et de prostitution pour les Américains nantis, corruption, violence exercée par les sbires de Batista, une pauvreté extrême pour beaucoup de Cubains)le jeune Fidel Castro décide d’entamer des actions. Le 26 juillet 1953, avec une centaine de partisans, il attaque la caserne Moncada à Santiago de Cuba. 

C’était alors la deuxième du pays en importance et il espérait par cette action déclencher une révolte populaire. L’assaut est découvert trop tôt et devient un échec flagrant. Beaucoup d’hommes de Castro sont tués, les autres, lui y compris, sont emprisonnés et finalement transférés au Presidio Modelo (la prison modèle) de l’ Ile de la Jeunesse. L’assaut de la Caserne Moncada sera pourtant considéré comme le point de départ de la Révolution Cubaine. Un Mouvement du 26 juillet (Movimieneto 26/7) est créé et le 26 juillet est encore toujours un jour de fête nationale, lors duquel à chaque fois une autre province à l’honneur d’organiser les festivités (et durant des années agrémentées d’un long discours de Fidel).

Plus tard (fin des années ’60) une école primaire s’installe dans les bâtiments de la caserne, et une aile est transformée en musée de l’histoire de cuba, de la conquête espagnole à aujourd’hui (avec une bonne part consacrée à la révolution). Sur la façade de l’édifice on voit encore les impacts des balles lors de l’assaut, laissés ainsi en commémoration des débuts de la Révolution.

En face de la caserne on trouve le monument dédié à Abel Santamaria, héros révolutionnaire local. Auparavant l’hôpital Saturnino Lora se trouvait à cet endroit, et dans la salle des infirmières eu lieu le procès lors duquel Fidel Castro fut condamné après l’attaque. En tant qu’avocat il assura sa propre défense et y prononça son célèbre discours « La Historia me absolverá » (L’ Histoire m’acquittera).

Dans la banlieue de la ville le visiteur pourra visiter le pendant du cimetière Colomb de La Havane : le cimetière Santa Ifigenia, qui est également un lieu de repos pour de nombreuses figures historiques du pays, sinon même plus qu’à La Havane.

Le premier monument, inévitable, est le mausolée de héros national José Martí. L’édifice hexagonal se trouve à l’entrée du cimetière et est en permanence gardé par des militaires, remplacés cérémonieusement toutes les demi-heures. Devant le mausolée flotte un gigantesque drapeau cubain, que l’on descend chaque jour lors du dernier changement de garde, avec une musique militaire nostalgique. Chacun qui connaît l’histoire de Cuba et a une tendresse pour ce pays y vivra un moment d’émotion. Le cercueil de Martí se trouve au centre de la tour, sous un drapeau cubain et une statue en marbre de Martí regarde son propre cercueil. Au sommet de la tour il y a six vitres qui laissent un rayon de soleil frapper le cercueil, en respect du dernier désir de Martí de pouvoir reposer sous le soleil de Cuba (la disposition des vitres est telle qu’un rayon touche toujours le cercueil).

Mais le cimetière rassemble d’autres noms célèbres : Emilio Bacardi (premier bourgmestre de Santiago après l’indépendance de Cuba et père de l’empire Bacardi), les frères Frank et Josué País (qui ont dirigé la lutte clandestine à Santiago en soutien de la guérilla de Castro), Compay Segundo (le fameux chanteur, entre autres du Buena Vista Social Club), et beaucoup d’autres. De nombreuses tombes sont décorées du drapeau cubain ou de celui du Mouvement du 26/7, ou des deux. Ceux avec un drapeau cubain sont celles de quelqu’un tombé lors des luttes pour l’indépendance, ceux avec un drapeau du M-26-7 sont celles de ceux tombés lors de la lutte révolutionnaire.

L’amateur d’histoire peut encore faire un saut jusqu’à la Loma de San Juan, l’endroit où les Cubains ont livré l’ultime bataille contre le colonisateur espagnol (1898). Ils étaient aidés par les Américains qui, après l’explosion de leur navire « Maine » à La Havane, en avaient fait le prétexte pour déclarer la guerre à l’ Espagne et se mêler ainsi à la lutte. Au départ du dernier espagnol après la bataille de San Juan les Américains estimaient mériter une récompense pour leur apport dans la bataille. Près de la colline de San Juan le visiteur découvre quelques petits monuments dont une statue d’un soldat des trois parties au conflit, un Cubain, un Espagnol et un Américain, ainsi que la tombe du soldat inconnu.

(A suivre)

Association

La régionale de Gand mise tout sur la Brigade Carlos Habré

Le 28 avril le deuxième « Run for Cuba » (Courir pour Cuba) s’est déroulé aux Blaarmeersen à Gand, ou comme le dit l’affiche : « Courir pour des lits d’ hôpitaux ».

Après une première édition, qui nous a donné un peu d’expérience, nous avons osé organiser un deuxième jogging. Les nombreuses réactions enthousiastes après le tour du Watersportbaan avaient refoulés les points négatifs (beaucoup d’efforts, peu de rentrées).

Avec ce jogging nous ne voulons pas seulement récolter de l’argent pour nos projets, mais aussi toucher un autre public, donner des informations sur nos projets et essayer de les motiver de nous accompagner.

La participation, malgré un temps idéal pour courir, n’était pas exceptionnelle, mais suffisante pour un événement agréable. Le parcours était beau et varié. Une fois de plus les réactions étaient très positives, nous incitant à penser déjà au prochain jogging. L’activité a rapporté 400 €, destinés au financement de la prochaine Brigade à Santiago.

1er Mai au Marché du Vendredi

Notre présence avec un mojito-bar lors des festivités du 1er Mai est déjà une tradition. Ici aussi le temps nous a été clément, assurant de nombreux visiteurs et une bonne vente.

Déjà avant l’arrivée du cortège beaucoup d’amis nous rendaient une visite et nous discutions avec les passants pour les informer de nos activités et les inciter à boire un verre.

Après l’arrivée du cortège la demande de mojitos devenait presque impossible à suivre et les gens restaient sur la place pour profiter du bon temps et des animations.

A la fin de la fête le compteur affichait 140 litres de mojito et un revenu de 3.000€. Une bonne nouvelle pour la Brigade, quand on sait que nous espérons expédier trois conteneurs de matériaux de construction (offerts par différents sponsors) à Cuba et que les frais de transport pour un seul conteneur sont déjà de 3.700 €.

La Brigade, qui se chargera de la rénovation d’une aile de l’ Hôpital Ambrosio Grillo, est prévue en mars 2014. La préparation est démarrée et des volontaires se sont déjà présentés, mais le chemin est encore long et difficile. 

Marc Wuytack

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