7. Cuba depuis la révolution

7. Cuba depuis la révolution

Le 16 janvier 1959 Fidel est nommé premier ministre et la fonction de président revient à Manuel Urrutia, un juge qui avait défendu les attaquants de la caserne Moncada en 1953.

Une des premières grandes réformes introduites par le nouveau régime fut la réforme agraire, promise depuis longtemps.  Dans une première phade (1959) tous les domaines de plus de 400 ha sont nationalisés (dont les terres de la United Fruit Company). Des critiques sur la réforme vont mener au remplacement de Urrutia par Osvaldo Dórticos, un dirigeant du M-26-7 de Cienfuegos. C’était une période agitée : beaucoup de techniciens bien formés, des ingénieurs, des juristes et des juges ne voient pas l’avenir du même oeuil que Fidel Castro et quittent le pays. Dans la Sierra del Escambray, au centre de l’île, s’installe une contre guérilla (soutenue par la CIA) et les relations avec les Etats-Unis tournent au vinaigre. Nixon, le vice-président américain, est convaincu que Castro est influencé par les communistes (fait nié par Castro jusqu’alors) et fait un discours anti Castro aux Etats-Unis qui mènera finalement à l’invasion de la Baie des Cochons en 1961 (voir plus loin).

Pour pallier à tout ceci Castro cherche l’appui de l’Union Soviétique, qui accepte en 1960 d’envoyer des techniciens à Cuba pour compenser la fuite des cerveaux.

En mars 1960 le navire français « Le Coubre », chargé d’armes belges, explose dans le port de La Havane. Il y a 81 morts et 200 blessés. Cuba accuse les émigrés Cubains, soutenus par la CIA et les relations avec les Etats-Unis se dégradent encore un peu plus. Deux semaines plus tard Eisenhower charge la CIA d’entraîner  une petite armée contre-révolutionnaire pour renverser le régime de Castro. En juin de la même année les raffineries de Texaco, Standard Oil et Shell refusent –sous pression des Etats-Unis- de raffiner du pétrole russe. Deux semaines plus tard le gouvernement nationalise ces firmes. En juillet Eisenhower supprime le quota de 700.000 tonnes de sucre normalement vendu aux Etats-Unis, mais l’Union Soviétique se propose de racheter tout le sucre refusé par les nord-américains. En août Cuba nationalise les compagnies de téléphone et d’électricité (aux mains des nord-américains) ainsi que 36 moulins à sucre. Les Etats-Unis imposent à l’OEA (Organisation des Etats Américains) une résolution condamnant l’ingérence extracontinentale (donc soviétique) dans l’hémisphère occidental.

En octobre 1960 Castro nationalise la majorité des banques et presque 400 des plus grandes entreprises cubaines. Une loi de réforme urbaine nationalise les habitations louées. Les Etats-Unis réagissent en instaurant un embargo partiel contre Cuba, encore le même mois. Cuba riposte à son tour en nationalisant les propriétés nord-américaines qui ne l’étaient pas encore. La guerre froide se joue à fond sur le théâtre cubain et tout doucement le nouveau régime ne trouve plus de soutien que chez l’Union Soviétique.

Fin 1961 l’ambassade nord-américaine à La Havane était le noyaux de toutes sortes de tentatives de déstabilisation et Cuba imposa aux Etats-Unis de réduire le nombre des personnes employées à l’ambassade de 300 à 11, chiffre équivalent au personnel cubain de l’ambassade à Washington. Les Etats-Unis préfèrent rompre les relations diplomatiques avec Cuba et interdisent à leurs ressortissants de voyager à Cuba. Le quota sucrier est, lui,  réduit à zéro.
Des dizaines d’attentats contre Castro sont ourdis, ainsi qu’un plan pour faire chuter le régime. L’épisode le plus connu en est celui de l’invasion de la Baie des Cochons (Playa Giron pour les Cubains). Le 17 avril 1961 environ 1.400 émigrés Cubains (entraînés par la CIA) débarquent sur la plage de Giron et à Playa Larga, sur la côte sud de Cuba, près de la région marécageuse de Zapata. On estimait que cette région, peu intéressante, ne serait pas gardée et qu’on pourrait y accaparer un bout de territoire cubain à partir duquel on pourrait renverser le régime de Castro. Mais Castro et ses hommes étaient bien préparés et l’invasion de la Baie des Cochons se transforma en cauchemar pour les Etats-Unis. 72 heures après le débarquement la majorité des attaquants étaient prisonniers et 11 avions de combat ennemis éliminés. Les 1.200 prisonniers seront échangés par après contre de la nourriture et des médicaments. A Cuba cette invasion est enregistrée en tant que première défaite militaire des Etats-Unis sur le continent américain, prestation dont on est encore très fier à ce jour.
Après la défaite de la Baie des Cochons les Etats-Unis décrètent un embargo total (juin 1961) et excluent Cuba de l’OEA en janvier 1962. En octobre 1962 Cuba est une fois de plus au centre de l’actualité mondiale, durant la crise des missiles. L’ Union Soviétique avait placé à Cuba des missiles nucléaires qui pouvaient toucher n’importe quelle région américaine, ce qui n’était pas du goût des Etats-Unis (malgré le fait que eux faisaient la même chose avec l’ Union Soviétique à partir de l’Europe Occidentale). Finalement Krouchtchev décide de démanteler les installations, le monde échappait de peu à une troisième guerre mondiale.

En 1963 on appliquait la deuxième réforme agraire, nationalisant environ 10.000 entreprises agraires de moyenne et de grande superficie. La limité pour une ferme privée est maintenant fixée à 65 ha. Un peu plus des 2/3 des terres agricoles était aux mains de l’état. En 1968 les 55.000 petites entreprises non agricoles restantes sont nationalisées.

Fin des années soixante, pour diverses raisons, l’économie cubaine ne tourne pas rond, malgré l’aide massive de l’ Union Soviétique, et la tentative de produire dix millions de tonnes de sucre, en 1970, déséquilibre l’économie en mettant trop l’accent sur le secteur sucrier.

Durant les années ’70 et ’80 l’économie cubaine devient de plus en plus dépendante de l’ Union Soviétique. En 1988, 87% du commerce extérieur de Cuba se faisait avec le bloc de l’Est de l’époque.

En 1975 le Premier Congrès du Parti Communiste de Cuba approuve une nouvelle constitution. Le pays est maintenant divisé en 14 provinces (au lieu de six) et la fonction de président (toujours assurée par Osvaldo Dorticos) est reprise par Fidel Castro (auparavant premier ministre).

Entre temps Cuba joue un rôle marqué sur la scène internationale. Durant les années ’60 et ’70 le temps semblait mûr pour d’autres révolutions. Che Guevara essaya d’abord au Congo, puis en Bolivie, où il fut fait prisonnier et exécuté en présence de conseillers de la CIA. Cuba envoya des milliers d’hommes en Afrique pour y soutenir les mouvements révolutionnaires en Angola, en Guinée, en Ethiopie et au Mozambique. En Angola ils réalisèrent une éclatante victoire contre l’armée du régime de l’Apartheid d’ Afrique du Sud, succès applaudi dans l’ensemble du tiers monde. Castro obtint la présidence du Mouvement de Pays Non Alignés et peut ainsi démontrer au monde entier que Cuba n’est pas un satellite de l’ Union Soviétique.

En 1977 les Etats-Unis établissent une section d’intérêt à La Havane et Cuba en ouvre une à Washington, toujours ni consulat, ni ambassade, mais le balbutiement de timides relations diplomatiques. Au milieu des années ’80 on démarre à Cuba une campagne de rectification des erreurs du passé. On essaye de limiter la bureaucratie et de plus organiser une participation au niveau local. A la fin des années ’80 le mur de Berlin tombe, l’ Union Soviétique implose, suivi de l’ensemble du bloc de l’Est, et les mesures d’aide économique à Cuba s’écroulent. Le pays perd 75% de son commerce extérieur et des mesures urgentes s’imposent. Castro annonce une « Période spéciale en temps de paix » et des mesures d’épargne drastiques sont introduites. La première moitié des années ’90 est une période noire pour les Cubains, avec des manques dramatiques de beaucoup de matériaux et de produits de consommation. Les portes sont ouvertes pour une collaboration économique internationale au travers de joint-ventures, le tourisme international est intensifié pour sauver l’économie de la noyade. Depuis la deuxième moitié des années ’90, l’économie cubaine croît à nouveau, lentement, mais régulièrement.

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